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9 août 2010

La bête faramineuse

310_pbergouniouxC’était le livre que je cherchais, celui qu’il me fallait pour apprécier Pierre Bergounioux comme je le pressentais, c’est-à-dire comme un auteur important, qui sera toujours présent sur mon chemin. Voilà quelques années que cet auteur m’attire, pourtant par deux fois, et malgré son écriture délicate, je n’ai pu entrer dans son univers. Je restais au seuil avec un sentiment de frustration. J’avais trouvé ses souvenirs d’enfant trop « garçon », non pas macho comme je l’ai éprouvé parfois avec Erri de Luca, mais évoquant des sentiments de garçons, plus Grand Meaulnes, auxquels j’avais du mal à m’identifier.
Mais déjà, les rares fois où j’avais pu entendre parler Bergounioux (très peu, il n’est pas médiatisé, mais j’ai le souvenir très précis d’une émission sur France Culture et de quelques passages TV tard dans la nuit) ce fut un émerveillement : chaque pensée, chaque phrase roule merveilleusement, aboutit à une sensation de bonheur rare, par la beauté des mots, par les images qu’ils évoquent, pour son parler : Bergounioux parle comme il écrit, ou écrit comme il parle.

Et j’ai lu « La bête faramineuse », et j’ai plongé dans la splendeur des mots et des sentiments de cet enfant de onze ans, et j’ai compris la recherche, le travail de Bergounioux sur lui-même. Onze ans c’est l’âge charnière, la conscience d’être encore un enfant mêlé au pressentiment de la fin définitive d’un monde. Onze ans, c’est un regard dans l’univers des adultes, c’est la volonté folle de vivre encore l’aventure, l’insouciance, de la vivre pleinement pour ne pas l’oublier. Onze ans, c’est la bête faramineuse que l’on va traquer dans les bois, à la tombée de la nuit, la peur au ventre.

Un grand père aventurier, cultivé, qui s’éteint doucement dans un été brûlant pendant les vacances en Corrèze, aura transmis au narrateur et à son cousin le désir d’aller chercher ailleurs, plus loin, leurs propres limites : dans la quête de la bête ou dans l’exploration du haut plateau si désertique que la vie peut s’arrêter. « La bête faramineuse », c’est la question au grand père que l’on n’ose pas poser : est-ce que tu as peur ? C’est le premier doute sur le père, celui qui fait grandir : est-ce que tu m’as menti ? C’est la délicatesse des sentiments, des rapports aux parents (les adultes) des rapports au petit frère (l’enfant inconscient, qui ne sait pas), de la première émotion amoureuse provoquée par l’ombre bleue (cette petite fille croisée sur le chemin poussiéreux alors que l’on est honteux d’être suant, rouge et coléreux d’avoir trop couru après un « trompe-la-mort » inatteignable). Ce sont les silences de la grande maison de famille rythmés par les bruits familiers. Les questionnements des deux garçons, leurs réflexions, leur espoir : « nous n’avons que onze ».

Titre : La bête faramineuse | Auteur : Pierre Bergounioux | Editeur : Gallimard | Thème : Littérature française

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