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10 août 2010

Blaise Cendrars - La Prose du Transibérien

"Blaise, dis, sommes-nous bien loin de Montmartre?"
Nous sommes loin, Jeanne, tu roules depuis sept jours
Tu es loin de Montmartre, de la Butte qui t'a nourrie, du Sacré Coeur contre lequel tu t'es blottie
Paris a disparu et son énorme flambée
Il n'y a plus que les cendres continues
La pluie qui tombe
La tourbe qui se gonfle
La Sibérie qui tourne
Les lourdes nappes de neige qui remontent
Et le grelot de la folie qui grelotte comme un dernier désir dans l'air bleui
Le train palpite au coeur des horizons plombés
Et ton chagrin ricane...

"Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre?"
Et à Khaïlar une caravane de chameaux blancs
Je crois bien que j'étais ivre durant plus de cinq-cent kilomètres
Mais j'étais au piano et c'est tout ce que je vis
Quand on voyage on devrait fermer les yeux
Dormir j'aurais tant voulu dormir
Je reconnais tous les pays les yeux fermés à leur odeur
Et je reconnais tous les trains au bruit qu'ils font
Les trains d'Europe sont à quatre temps tandis que ceux d'Asie sont à cinq ou sept temps
D'autres vont en sourdine sont des berceuses
Et il y en a qui dans le bruit monotone des roues me rappellent la prose lourde de Maeterlink
J'ai déchiffré tous les textes confus des roues et j'ai rassemblé les éléments épars d'une violente beauté
Que je possède
Et qui me force..."


Extrait de
"La Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France", In "Du Monde entier au coeur du monde", Gallimard-Poésie.

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