Journal 1990 - 1995 - extrait 2
“Je suis très très fatigué. C’est un peu effrayant, cette vieillesse qui vous empêche d’envisager la traversée de la ville en dix minutes.
Mon pauvre corps.”
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“ Très bonnes et belles - et enthousiastes - représentations des Solitaires à Paris. Un vrai beau et bon succès pour un spectacle long et difficile (même mes parents qui l’ont vu à Belfort l’ont aimé).”
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“Nous sommes restés plus de trois heures à oublier le reste des gens, à se caresser à n’en plus finir, à s’embrasser tout le temps, ne lâchant jamais nos bouches, nos seins, nos nuques. Nous avons dû nous sourire au bout d’une heure. Nous étions d’un sérieux et d’une lenteur infinis, au milieu des autres qui ne cessaient d’essayer de le toucher, le caresser. J’étais triste comme jamais. Il voulait que je sourie.
Il me parla doucement, il ne voulait pas venir chez moi.
Il dit : “Après, je partirai...”
Plus de trois heures à ne plus rien voir que nous (dans cette foule).”
Auteur : Jean-Luc Lagarce - Titre : Journal 1990 - 1995 - Editions Les Solitaires Intempestifs