Les règles du savoir-vivre dans la société moderne
Voila, c'était hier soir... et c'était magnifique !
Époustouflante actrice dans un monologue incisif de Jean-Luc Lagarce, inspiré d'un petit manuel publié en 1889 par la baronne Staffe sur les règles de bonne conduite en société (sic).
Devant un rideau rouge fermé, une simple table et une chaise, et Mireille Herbstemeyer, en tailleur strict et chignon tiré, entame une conférence sur les bonnes manières... et à laquelle le public participe. De ce vernis, de petits détails annoncent la fêlure : un pas de danse, une boutade... l'humour est irrésistible, les commentaires cruels. De la déclaration de naissance à l'organisation du mariage. Ce qu'il faut faire nous dit-on.
Puis le rideau s'ouvre sur une scène immense, déserte, où trône une robe de mariée. En enfilant la robe, le jeu de l'actrice change, s'assouplit, se libère. La dichotomie entre l'énoncé des principes et la réalité obsédante de la vie, s'affirme. En virtuose, Mireille Herbstemeyer poursuit le déroulement du chemin balisé de la vie, cérémonie de mariage, noces d'argent, noces d'or. C'est drôle et mordant. Irrésistible.
La mise en scène de François Berreur est superbe, et sert magnifiquement le jeu de l'actrice. Un éclairage "miroir", que je voyais pour la première fois sur scène, accentuait le double discours : on voyait distinctement le reflet de l'actrice sur le sol, comme si elle dansait et évoluait sur un immense miroir de glace. Son reflet, donc l'envers de la réalité, image tremblante contre principes péremptoires. C'était superbe !
La dernière partie, l'actrice en combinaison de dentelle noire et cheveux défaits, sur le deuil et ses règles désuètes et hypocrites. Puis, la possibilité d'un remariage, le retour à la vie de société et ses légèretés. Cinglant.
Auteur : Jean-Luc Lagarce - Metteur en scène : François Berreur - Actrice : Mireille Herbstemeyer - Salle Benoît XII Avignon