Sul concetto di volto nel Figlio di Dio - Festival d'Avignon 2011
Première en France, (et avant-première sur lireaujardin... sourire...) ''Sul concetto di volto nel Figlio di Dio" de Romeo Castellucci ce soir à l'Opéra-Théâtre. C'était hier la répétition générale, je n'y étais pas mais mon cousin oui, et voici le papier (et les photos) qu'il m'a donné suite cette avant-première.
Et pour compléter, cette année, un festival très "famille", le premier garçon sur la vidéo et sur la photo qui jette la première grenade est mon neveu Paul.
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Spectacle : « Sul concetto di volto nel Figlio di Dio »
Conception et lumière : Romeo Castellucci
You are (not) my shepherd
Le décor est planté : dans un intérieur cossu, un vieil homme incontinent se lâche tandis que son fils, s’apprêtant à partir travailler en costume tiré à quatre épingles, ne peut pas quitter les lieux sans l’avoir nettoyé et changé. La scène se répète sans cesse, à la limite de l’insupportable, plongeant le spectateur dans un sentiment mitigé de gêne et d’empathie. La scène se déroule sous le regard d’une immense reproduction du Cristo benedicente d’Antonello da Messina.
L'intrigue a plus allure de purgatoire que d’enfer, comme une suite logique du Purgatorio que Romeo Castellucci avait monté il y a trois ans en Avignon lorsqu’il était artiste associé de la 62e édition du festival, et dont certains ont encore du mal à se remettre.
Ici les stigmates de la longue agonie du père se projettent dans les traces d’excréments laissées sur le sol que le vieux essaie désespérément de laver avec un bidon de Betadine. Mais le fils qui tente continuellement d’effacer ces traces n’est-il pas voué lui aussi à porter ses propres stigmates ? Le bon berger porte encore les marques qu'il a reçues pour nous protéger et nous sauver de l'enfer… cet enfer que le personnage principal incarnant le père donne l’impression de vivre en expiant ses fautes. Chacune de ses décharges défécatoires induisant son lot de repentances… Le père s’excuse continuellement auprès de son fils qui ne cesse de le laver, au bord de la rupture.
L’on voit à peine le visage honteux du père, alors que la pièce est placée sous le signe du Visage… le visage du Christ tout d’abord, premier spectateur impassible de la scène qui se déroule sous son nez. Et ce que la reproduction en toile de fond ne nous montre pas, c’est la partie inférieure du tableau avec le geste de bénédiction du Christ. Ce parti pris scénique renforce à mon sens la présence divine et rend la scène plus équivoque.
La très belle scène qui suit présente un groupe d’enfants dégoupillant des grenades pour les lancer sur l’icône sacrée. Elle porte peut-être un élément de réponse à l’expectative dans laquelle le spectateur est plongé, ou plutôt participe d’un mouvement libérateur. Le dernier enfant à rester sur la scène se tourne vers le public et semble tenir le fil de la marionnette du père qui, dans un dernier sursaut de dignité, relève son visage, se lève et quitte tranquillement la scène, laissant la place au Visage scrutateur dont les stigmates ne vont pas tarder à se prononcer… et au spectateur le choix d’une réponse : "Tu es mon berger ou Tu ne l'es pas."