Eloge de la faiblesse
"Eloge de la faiblesse", paru en 1999, est le premier livre d'Alexandre Jollien. Un parcours peu ordinaire pour ce garçon agé de 23 ans, handicapé de naissance, lorsqu'il a franchi le pas pour passer à l'écriture : après avoir passé 17 ans dans un centre spécialisé, Alexander Jollien arrive à sortir de cet univers et du sort qu'on lui réservait (fabriquer des cigares !!) par les études : école de commerce, lycée, puis université en cours de philosophie. Un parcours dû à une volonté puissante mais qui a été semé d'embuches (c'est un euphémisme).
Ecrit sous forme d'un dialogue avec Socrate, Alexandre raconte son parcours qui est prétexte à réflexions : comment gérer le rapport aux autres, qu'est-ce que la normalité.
Soutenu par Michel Onfray après la sortie de ce premier livre , on a eu l'occasion de voir ou d'entendre à cette période Alexandre Jollien dans pas mal d'émissions culturelles et je le trouvais intéressant. J'avais lu "La construction de soi" il y a quelques années et là j'avais été un peu déçue, je ne le trouvais pas assez poussé. Je l'ai entendu il y a un an environ, lors d'une interview à la radio, mais son orientation plus mystique me convenait moins.
J'ai donc préféré ce livre-ci, sans lui trouver toutefois une profondeur philosophique assez forte, mais son enthousiasme, son optimisme sont très communicatifs, et ses reflexions tirées de son expérience sonnent justes : l'indispensable motivation pour avancer, se dépasser ; l'amitié comme moteur essentiel ; la philosophie pour comprendre le monde.
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Extrait :
Alexandre :
[...] Je me rappelle toujours cet esprit rebelle à qui j'adressai ma salutations habituelle : "Sois sage". Un jour, il me répondit à brûle-pourpoint : "Et toi, marche droit !" Cela me procura un plaisir extrême. Il m'estimait pour moi-même et n'avait pas pris les pincettes que prennent ceux qui me sourient béatement quand, à la caisse, je paye mon paquet de spaghettis aux herbes. Il y a des sourires qui blessent, des compliments qui tuent.
Socrate :
Tout cela voudrait dire que la pitié blesse plus que le mépris ?
Alexandre :
Oui, pas de pitié. Une fois de plus, je donne raison à Nietzsche. Je crois qu'il voit juste quand il condamne la pitié, l'hypocrisie ou le paraître. Chaque jour, je rencontre ce regard condescendant qui croit me faire plaisir, peut-être sincérement, mais qui nie ma liberté et me nie ipso facto.
Auteur : Alexandre Jollien - Titre : Eloge de la faiblesse - Editions du Cerf - 1999